vendredi 14 avril 2017

Seconde chance ?


Elle a changé. Cela fait plusieurs jours qu’elle n’est plus la même. 

Je l’ai retrouvée juste après l’enterrement. Je n’ai pas compris ce qu’elle faisait là, assise sur le siège passager de ma voiture, à me fixer de ses grands yeux écarquillés. J’ai tourné la tête vers sa tombe, mais le couvercle n’avait pas bougé. Pourtant ma femme était bien là, à trembler de froid. Sa robe blanche lui collait à la peau que je voyais à travers le tissu trempé. Ses longs cheveux noirs formaient une cascade sombre sur ses épaules et sa maigre poitrine. Elle ne disait rien, me regardait follement, semblait être aussi perdu que je l’étais. J’aurais pu avoir peur, j’aurais pu hurler, j’aurais pu m’enfuir, mais je la reconnaissais, c’était bien elle.  

Je ne me suis plus posé de questions et j’ai démarré la voiture. Un peu plus tard, une fois arrivé à maison, elle s’est assisse sur le canapé. Le buste droit, le regard lointain, les doigts arqués de ses mains grattaient le tissu trempé de sa robe reposant sur ses maigres cuisses. J’ai pris le cadre posé sur le poste de télévision et je me suis assis à côté d’elle. Je lui ai montré notre photo de mariage, je lui ai dit que la belle jeune femme aux cheveux noirs c’était elle. Elle a baissé la tête par à-coups, a regardé la photo. J’ai alors vu ses lèvres trembler, j’ai entendu des gargouillis sortir de sa gorge. Elle semblait aussi émue que je l’étais et ses longues mains bleuâtres ont chiffonné sa robe. Un bruit de vertèbre a résonné quand elle a brusquement tourné la tête vers moi. Son regard écarquillé m’a fait frissonner ; je me suis mis à trembler, j’étais assailli par un flot d’émotions contradictoires, me demandant si je rêvais ou si tout cela était bien réel. J’ai alors posé un baiser sur ses lèvres. C’était glacé. Un petit souffle rauque sortait de sa bouche et je me suis dit qu’elle avait dû apprécier ce baiser. J’ai alors pris sa main gauche, j’ai doucement décrispé ses doigts et j’ai embrassé l’alliance autour de son annulaire gauche. Elle a émis d’un son glaireux que j’ai pris pour un pardon sans savoir si elle se souvenait vraiment de tout.

Je me suis levé et je l’ai tiré vers moi. Elle ne bougeait pas, semblait avoir peur. Je l’ai rassurée, je lui ai dit que moi aussi je ne comprenais pas ce qui nous arrivait, mais que la vie nous offrait peut-être une seconde chance après l’accident. Nous sommes finalement montés dans notre chambre où je me suis assis au bord du lit.  J’ai fait glisser ses bretelles le long de ses frêles épaules et j’ai apprécié la vue cadavérique de son corps. J’ai caressé ses côtes, j’ai léché ses seins fripés, j’ai sucé ses tétons gelés et, peu à peu, j’ai senti mon sexe me picoter. J’ai aussi embrassé son ventre ridé, ce ventre qui aurait pu donner naissance à Joshua. Je l’ai allongée sur le lit, je lui ai fait l’amour et même si c’était un peu difficile et assez froid, j’ai aimé ça. Après son coma de trois mois, j’étais tellement heureux de la retrouver que l’état de son corps ne m’importait guère, tout comme son odeur de décomposition. C’était ma femme, je l’aimais, c’était si simple à comprendre.     

Elle a passé les jours suivants à déambuler dans la maison. Elle s’arrêtait devant chaque souvenir posé sur les étagères, regardait les tableaux, les livres de notre grande bibliothèque, descendait à la cave où étaient entreposées nos bouteilles de vin. Elle s’attardait aussi dans la chambre qu’elle avait aménagée pour Joshua. Du bout des doigts elle caressait le rebord de son lit à barreaux, murmurait des sons rauques, pleurait des larmes sèches. Je ne voyais pas la raison de revenir à la vie si c’était pour ressasser le passé ? Était-ce ça la seconde chance de notre couple ?

Au bout d’une semaine, elle ne quittait plus la chambre de Joshua. Elle traînait lentement autour du lit, regardait le coffre à jouets, caressait les poils du cheval à bascule que lui avait offert sa mère avant l’accident. Quand j’essayais de la sortir de la chambre, elle se débattait avec une surprenante vigueur. Je n’ai pas insisté, j’ai cédé et elle a fini par y passer des journées complètes, puis des nuits.

La nuit dernière je l’ai entendue geindre dans la chambre du petit. Elle murmurait, chuchotait je ne sais quoi, mais c’était très désagréable. Puis j’ai entendu les pas de sa démarche chaotique dans le couloir. Elle s’est arrêtée devant sur le pas de la porte, elle me fixait sans bouger. J’entendais le souffle rauque et rapide de sa respiration, comme si elle était énervée. Elle devait se souvenir de quelque chose, mais c’était impossible, j’avais été si prudent. Puis elle s’est approchée de moi, s’est penchée sur mon oreille et m’a soufflé d’une voix agonisante : « Pourquoi ? » Je devais alors trouver une solution avant qu’elle ne se souvienne de tout. De plus, l’odeur de décomposition devenait difficilement supportable.

Le lendemain, alors que j’avais envisagé le pire, elle s’est plantée devant la porte-fenêtre du salon et n’en a plus bougé. Les mains plaquées contre la vitre, elle regardait le jardin. La musique de ses ongles sur le carreau est vite devenue insupportable. Pourquoi était-elle revenue si c’était pour me tourmenter ? Que voulait-elle exactement ?

J’ai ouvert la porte-fenêtre et elle s’est lentement avancée jusqu’au fond du jardin. Elle s’y est arrêtée puis s’est agenouillée. Le craquement de ses os m’a fait frissonner. Avec ses mains arquées, elle s’est mise à creuser la terre, à creuser encore et encore, sans jamais s’arrêter. Il n’y avait plus de doute : non seulement elle se souvenait, mais en plus elle savait où je l’avais enterré.

Un peu avant la tombée de la nuit, elle s’est arrêtée de creuser et a soudainement plaqué ses mains sur son visage. Je me doutais de ce qu'elle venait d'apercevoir au fond de son trou. Moi j’étais assis sur le canapé, je sirotais une bière, je la regardais avec un petit sourire en coin. J’avais mon révolver posé sur mes cuisses, au cas où les choses tourneraient mal, même si je ne savais pas si on pouvait tuer ce qui était déjà mort.

Les mains plaquées sur le visage, elle semblait pleurer. Je voyais sa poitrine tressauter, des mèches de ses cheveux noirs tombaient dans son dos, sur la terre. Puis elle a plongé un bras dans le trou et a saisi le reste du gamin. J’ai vu une sorte de chose fripée et raide sortir du trou, une poupée miniature de chair décomposée qu’elle a embrassée avant de la bercer contre elle. J’entendais ses fredonnements glaireux. C’était très attendrissant, mais j’étais un peu vexé, car je comprenais qu’elle n’était pas revenue pour moi, mais pour lui. Alors à quoi bon ?

Je me suis levé avec le gun en main, et je me suis dirigé vers le fond du jardin. Je trouvais ça pathétique de la voir bercer ce fœtus crevé depuis trois mois. J’ai levé mon arme et j’ai visé sa tête. Elle l’a tourné, m’a regardé de ses yeux vitreux ; un léger sourire a fendu ses lèvres bleuâtres. J’y ai lu comme un soulagement. Ses lèvres tremblaient quand j’ai tiré. Sa tête a éclaté en plusieurs morceaux de cervelle et plaques de cuir chevelu. Elle s’est effondrée sur le côté, le reste de sa tête pendait mollement au-dessus du trou. Puisqu’elle était revenue pour lui, j’ai voulu lui faire plaisir et j’ai agrandi le trou. J’ai jeté la mère et le fils à l’intérieur puis j’ai remis la terre et j’ai balancé des graines de gazon avant de rentrer dans le salon. J’ai pris plusieurs autres bières et j’ai fini par m’endormir devant la télé. Ce sont les craquements des marches de l’escalier qui m’ont tiré de mon sommeil. Je n’ai jamais été trouillard, mais ça commençait à faire beaucoup. Heureusement j’ai dû imaginer ces bruits dans mon cauchemar répétitif, celui où je pousse ma femme dans le dos alors qu’elle s’apprête à descendre les escaliers. Il n’y avait rien dans l’escalier, pas l’ombre d’une silhouette et je me suis rendormi.      


Parfois, lors d’une nuit d’orage, quand un éclair zèbre le ciel et illumine le jardin, je la vois derrière la porte-fenêtre. Elle a une main plaquée contre la vitre et l’autre qui tient le bras du petit corps déformé de Joshua. Et dire qu’elle a poussé le vice jusqu’à nommer le gosse du même prénom que son amant… 

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mercredi 5 avril 2017

La porte mitoyenne



Par ce message je vais vous raconter exactement ce qui s’est passé, du début à la fin, sans oublier aucun détail. Je ne cherche pas à m’innocenter (qui le pourrait avec un simple message ?), je ne vous demande pas de me croire sur parole, je vous demande juste de me lire et de comprendre la nature véritable de ces évènements. Peut-être qu’une fois que j’aurais appuyé sur la touche enter de mon clavier, je me sentirais allégé d’un poids trop lourd à porter.

        Je suis un meurtrier, du moins c’est ce qu’en a conclu le juge des assises. Faute de preuves suffisantes, je n’ai été condamné qu’à cinq ans d’emprisonnement pour la disparition de trois personnes. En fait, j'étais le coupable idéal car la justice n’avait aucun autre suspect à mettre entre les barreaux. Entre les appels, les pourvois en cassation et les remises de peine pour bonne conduite, j’ai passé deux ans derrière les barreaux.  

Tout a commencé par un paquet. Un matin, en partant au boulot, je l’ai trouvé sur le paillasson de ma porte d’entrée. Léger, moins gros qu’une boîte à chaussure, du papier kraft et une ficelle l’entouraient. Il n’y avait ni nom, ni adresse, ni expéditeur dessus. J’ai failli toquer chez mes voisins de palier, mais, de peur d’être en retard au boulot, j’ai posé le paquet sur l’étagère de l’entrée.  Je n’y ai pas pensé de la journée puis le soir, quand je suis rentré à l’appart, j’ai buté dedans. Le paquet était tombé sur le carrelage du couloir et je me suis dit que je l’avais simplement mal placé sur l’étagère. Il était aux alentours de 21 heures et encore une fois je n’ai pas voulu déranger mes voisins pour savoir si ce paquet était à eux.

Comme je le fais chaque soir, je me suis servi un verre de scotch, j’ai allumé la télé et me suis vautré sur le canapé. J’avais posé le paquet sur la petite table du salon. Après avoir fini mon verre, au moment d’aller réchauffer un plat dans le four à micro-ondes, j’ai été surpris de voir le paquet au bord de la table, prêt à tomber. J’ai voulu le repousser, mais il a chuté à mes pieds. En haussant les épaules, j’ai ramassé le paquet, et comme mes voisins n’étaient pas venus le réclamer, j’ai défait la ficelle en prenant soin de ne pas abîmer le papier kraft. Quelques instants plus tard, je tenais entre mes mains quatre morceaux de bois qui encadraient une sorte de toile en jute. Les morceaux de bois étaient gravés de symboles que je pensais être des hiéroglyphes. Entre les symboles, des clous rouges ressortaient de travers. Je n’y connaissais rien en art, mais c’était du mauvais travail. J’ai alors tourné ce que je croyais être un tableau, mais en fait, c’était un miroir très sombre. J’apercevais toutefois mon reflet à l'intérieur même si les traits de mon visage avaient la couleur du charbon. J’ai frotté la glace, mais la fumée ne partait pas. Ne sachant que faire de cet objet, je me suis amusé un peu avec et j’ai fait plusieurs grimaces. Aussitôt quelque chose m’a fait frémir : le décalage de mon reflet. J’avais arrêté mes mimiques alors que mon reflet grimaçait toujours. J’ai fermé les yeux, les ai rouverts, mes grimaces continuaient dans la glace. Puis le reflet s’est mis à hurler alors j’ai lâché le miroir et…je me suis mis à trembler, j’avais mal au crâne et un goût de fer dans la bouche. Nous étions en plein été et, quand j’ai bu mon whisky, il faisait encore jour. Là, on était en pleine nuit, j’étais juste éclairé par la lumière hachurée du poste de télévision qui émettait un grésillement ininterrompu. Plus loin sur ma droite, la lumière jaunâtre de la cuisine formait une auréole sur le parquet. Je n’avais pas souvenir d’être tombé par terre. Je me suis donc relevé, j’ai voulu m’asseoir sur le canapé, mais il n’y était plus, comme le miroir qui lui aussi semblait avoir disparu. N’y comprenant rien, j’ai marché jusqu’à l’interrupteur du salon, j’ai tâtonné le mur sans le trouver. Alors je me suis avancé vers ma cuisine et quand j’y suis entré, j’ai trouvé mon frigo déplacé d’un bon mètre du mur. La tapisserie du mur où se trouvait le frigo était complètement déchirée et formait le contour d’une porte sans la poignée. Un jeu d’une trentaine de centimètres séparait la tapisserie du mur. Je n’avais jamais été informé d'une autre porte dans ma cuisine. Quelqu’un connaissant l’existence de cette porte secrète s’était-il introduit chez moi ? Je me suis alors souvenu du miroir, du reflet grimaçant, mais un reflet pouvait-il être responsable d’une porte secrète ouverte dans ma cuisine ? Y avait-il un lien entre les deux ? Je n’y comprenais rien.

J’ai senti mes poils se hérisser quand j’ai entendu un bruit diffus, le même que le poste de ma télévision. Il provenait de derrière cette seconde porte. Deux choix se présentaient à moi : soit je vérifiais mon appartement au risque de me retrouver nez à nez avec un intrus, soit je m’assurais qu’il ne m’attendait pas derrière cette porte.

J’ai ouvert un tiroir pour prendre un couteau et je suis tombé sur un tas d’objets, dont une petite lampe-torche rectangulaire. Je l’ai prise et j’ai dû fouiller plusieurs autres tiroirs pour trouver mon couteau de cuisine. Je n’avais pas le temps de cogiter, de me dire qui avait déplacé mes affaires, alors je suis passé derrière le frigo et, le cœur battant, j’ai jeté un œil à travers l’embrasure de la porte : on n’y voyait rien, c’était complètement noir. J’ai passé la lampe-torche dans le jeu de la porte et le faisceau a balayé un mur gris, cimenté. Par réflexe, j’ai demandé s’il y avait quelqu’un, mais seul le bruit diffus m’a répondu. J’ai rassemblé tout mon courage, j’ai tiré la porte et…je me suis retrouvé face à un couloir cimenté d’une dizaine de mètres de long. Au fond de ce couloir, j’ai distingué un rai lumineux sous une autre porte. Quand j’ai braqué le faisceau au sol, j’ai lâché un juron.

Des traces de pas apparaissaient dans la poussière, toutes dans ma direction. Mais ce n’était pas des traces de pas normales, c’était de grandes empreintes avec des pieds très longs et très gros. Les quatre orteils se terminaient par une pointe acérée qui avait creusé la poussière en profondeur et le talon était aussi gros qu’une boule de bowling. Comme il n’y avait pas de traces en sens inverse, cette chose devait toujours se trouver dans mon appartement. Mais c’était si gros, si impressionnant que me retrouver nez à nez face à ce truc n’avait rien d’excitant. J’ai alors marché jusqu’au fond du couloir en prêtant attention à chaque détail. Hormis les empreintes et son atmosphère glauque, ce couloir restait commun et d’après mon intuition, reliait un appartement à un autre.

Le bruit diffus s’est intensifié près de la porte entrebâillée. Crispé, le cœur battant, j’ai regardé à travers l’embrasure et j’ai entraperçu un bout de meuble et du carrelage. Rassuré de ne pas me retrouver dans un endroit encore plus glauque, j’ai poussé cette vieille porte à la peinture écaillée et j’ai aperçu une cuisine qui ressemblait étrangement à la mienne. J’y suis entré et j’ai contourné le frigo que cette chose avait tiré pour pouvoir entrer dans ce couloir et rejoindre mon appartement. J’ai traversé la cuisine et par la porte ouverte j'ai aperçu un salon éclairé par la lumière hachurée d’un poste de télévision. Sa lumière pâle se reflétait sur une petite table de salon. À ma grande surprise, j’ai découvert mon miroir gisant de travers. Je ne comprenais pas comment mon miroir pouvait se retrouver là alors qu’il était censé être dans mon appartement ? J’ai voulu allumer la lumière du salon quand des craquements derrière moi m’ont fait dresser les cheveux sur la tête. Je me suis vivement retourné en balayant l’air de mon couteau. Un flic pointait son arme dans ma direction. Il m’a sommé de jeter mon couteau. Ce que j’ai fait… 

J’ai été accusé de la disparition de mes trois voisins, les parents et leur petite fille âgé de 4 ans. Un ami de cette famille qui venait leur rendre visite ce soir-là a entendu des hurlements puis a appelé la police. J’ai bien sûr tout nié en bloc, mais je ne pouvais pas expliquer ma présence chez mes voisins ainsi que les traces de sang découvert autour de ma bouche ainsi que d’infimes morceaux de chair sous mes ongles que j’aimais garder longs. Après analyse génétique, il s’agissait de ceux des trois disparus. J'ai hurlé au complot, car je ne pouvais pas avoir fait disparaître les corps en l'espace d'une heure ou deux. Ils m’ont aussi fait un lavage d’estomac sans rien découvrir de plus. Auraient-ils cru que je les avais bouffés ?

Les semaines qui ont suivi mon interpellation ont été très difficiles à vivre. Ma vie banale venait de basculer de la manière la plus dramatique qui soit. Mes parents sont riches et m’ont payé le plus talentueux des avocats. J’ai alors peu à peu repris espoir. Je ne comprenais toujours pas ce qui s’était réellement passé, comment je m’étais soudainement réveillé chez mes voisins ni comment je pouvais avoir eu des bouts de leur chair sous mes ongles ou leur sang sur mon visage. J’en faisais de terribles cauchemars, ou plutôt non, je n’en faisais qu’un, toujours le même : je marchais dans un couloir sombre, j’entendais le souffle rauque de ma respiration. Mes pieds me semblaient lourds, comme si ce n’était pas les miens et qu’ils appartenaient à quelque chose de bien plus gros que moi. Pourtant ils ne faisaient aucun bruit sur le sol. À chaque pas, je sentais aussi mon ventre rebondir et mon menton suivait ce mouvement de lourdeur. Des cris diffus bourdonnaient dans mes oreilles, des hurlements lointains, les supplications d’une fillette. J’ouvrais la porte du couloir et je me retrouvais dans une pièce éclairée par des torches. Je sentais du sable sous mes pieds et les murs de pierres étaient couverts de symboles qui ressemblaient à ceux du miroir. Face à moi, ce même miroir renvoyait ma silhouette floutée. Plus je m’avançais vers lui, plus mon reflet s’y dessinait avec précision. Et à chaque fois que je me voyais vêtu de cette peau jaunâtre et flasque, de ce ventre énorme, de ce triple menton, de ces yeux globuleux injectés de sang, de ce front très haut, à chaque fois que j’apercevais la tête de cette fillette entre les longs doigts de ma main droite, je hurlais jusqu’à me réveiller en sueur, le souffle perdu, le regard balayant les murs de ma cellule.

Mon psy m’a expliqué que mon inconscient avait transformé les accusations portées contre moi en un cauchemar où j’apparaissais en monstre cannibale. Étrangement, ce n’est qu’à ma sortie de prison que le cauchemar a cessé.

Malgré ma demande, les flics ont gardé le miroir comme pièce à conviction. Pour ma part, je ne suis jamais retourné dans mon ancien appart et j’ai dû quitter la ville à cause des « supporters » de la famille disparue qui jugeait ma peine de prison trop clémente.

Ce matin, j’ai reçu une carte postale de mes parents. La photo représentait un phénix déployant ses ailes au-dessus d’une pyramide sombre où l’on devinait le visage grimaçant de centaines d’individus. Au dos, il y avait un message de ma mère m’indiquant dans quel endroit du monde ils se trouvaient ce mois-ci. Profitant de leur fortune, mes parents étaient de grands voyageurs et profitaient simplement de la vie. Mais au dos de la carte, à la fin du message de ma mère, j'ai lu et relu cette étrange phrase : « Merci d’avoir libéré ton père de son fardeau. Ta renaissance commence. Le reflet du miroir n’est que celui de ton âme ».

Voilà, vous connaissez toute mon histoire et que vous me croyiez ou non m’est égal, ce n’est pas grave, c’est exactement ce qui s’est passé et je me sens tellement mieux à présent. J'ai l'intime conviction que je suis innocent, mais, sans vraiment le comprendre, j’évite toujours de me regarder dans un miroir. Et pourquoi le ferais-je puisque c’est lui qui me regarde…

Cette creepypasta est issue de mon esprit tourmenté. N'hésitez pas à vous abonner pour recevoir les dernières pastas directement dans votre boite mail, twitter, facebook, etc... N'hésitez pas aussi à partager mes creepys pour les faire connaître...





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