mercredi 21 septembre 2016

Le monstre du verre de lait



Affaire des "monstres" au verre de lait.
Texte piraté par DeepSkull pour le Journal « le détective du Net ».
Affaire suspecte n°3.
Affaire suspecte n°4 en cours de décryptage.

Ce qui suit est la synthèse d’une suite d’entretiens entre « l’accusé principal » du dossier et le psychanalyste Joseph M-------, travaillant à la section des terreurs nocturnes de l’hôpital B----. Nous avons volontairement réarrangé les réponses de l’accusé pour en faire un témoignage assez court. Alors, qui croire ? Coupable ou innocent ? Bonne lecture à tous nos abonnés.

Comme tous les soirs ma mère nous apportait un verre de lait aromatisé à la cannelle. Soit elle nous le donnait, soit elle le posait sur notre table de nuit. Ma sœur dormait sur le lit côté opposé au mien et finissait toujours ce verre de lait la première. Moi, je prenais mon temps, j’aimais le déguster, souvent en pleine nuit. Après un cauchemar, ça me rassurait de le boire. J’avais l’impression que ma mère se trouvait dans notre chambre et me susurrait les paroles d’une comptine. Je l’entends encore aujourd’hui ma pauvre mère…

Tout a commencé en pleine nuit. Ma maison était située un peu à l’extérieur du village, loin de la route, loin des bruits de la circulation. Parfois, on entendait des aboiements lointains, parfois c’était le hululement d'une chouette qui venait troubler mon sommeil. Cette nuit-là c’était silencieux, très silencieux. La lumière pâle d’une pleine lune filtrait à travers les rayons des volets de la fenêtre. Ça offrait une certaine pénombre à la chambre. On distinguait vaguement les meubles, les posters, la table de nuit, la silhouette de ma sœur allongée sous sa couette.

Je me suis réveillé à cause d’un sale cauchemar. J’ai aussitôt pris mon verre de lait pour me rassurer. Mais il était vide. Oui, vide. Je n'y avais pas touché quand ma mère a éteint la lumière. J’ai songé à réveiller ma sœur, à lui demander si c’est elle qui avait bu mon verre de lait. Je ne l’ai pas fait. C'est idiot, mais je n’ai pas réussi à me rendormir tout de suite à cause de cette question qui trottait dans ma tête : qui avait vidé mon verre de lait ? Alors qu'au petit matin je parvenais enfin à me rendormir, j’ai entendu comme des craquements, des bruits de pieds faits avec l’os du talon sur le plancher. Ça se dirigeait vers le placard. Je n’ai rien vu alors j’ai pensé que ça venait du plancher en bois du couloir qui craquait de temps en temps. J'aurais tant aimé me tromper.

Le lendemain matin, ma sœur m’a affirmé ne pas avoir bu mon verre de lait. Elle m’a juste dit qu’elle avait ouvert un œil, car elle aussi avait entendu des craquements.

Le soir suivant, j’ai fait la même chose, j’ai laissé mon verre de lait intact. Ma mère ne m’a pas posé de questions sur le pourquoi du comment. Elle connaissait cette habitude, car quand j'étais très jeune, j’ai souffert de terreurs nocturnes et un verre de lait me calmait après mes cauchemars.

Je ne sais pas pourquoi j’ai eu du mal à m’endormir. Je me trouvais stupide d’angoisser pour un verre de lait que ma sœur aurait bu. J’ai toutefois fini par trouver le sommeil. Pas longtemps je crois. Des chouinements m’ont réveillé. J’ai aussitôt allumé la lampe-chevet. Je n’ai rien vu. Sauf mon verre de lait vide. Je me souviens avoir ressenti comme un coup de couteau dans le cœur. Ça m’a fait très mal. Je me suis levé d’un coup et j’ai secoué ma sœur par le col en lui criant dessus. J’étais furieux. Elle s’est aussi mise à crier. Ma mère est entrée en courant dans la chambre et nous a séparés. Je lui ai dit pour le verre de lait. Elle n’en revenait pas de ma stupidité. Au moment où elle a été chercher un autre verre de lait, on a tous entendu un très léger ricanement. Ça venait du placard. On s’est tous regardés. Je m’en souviens très bien, ma mère était un peu angoissée à l’idée d’ouvrir la porte du placard. Malheureusement il n’y avait rien d’autre que nos vêtements suspendus à la tringle et nos jouets au sol. Mais moi j’ai vu le ballon rouler sur quelques centimètres ! Je jure qu’il a bougé ce putain de ballon ! Il a même cogné contre la porte quand ma mère l’a refermé !

Le lendemain matin, ma mère m’a de nouveau engueulé, car ma sœur portait des traces de griffures au niveau du cou et de la poitrine. J’ai protesté, j’ai rétorqué que je l’avais juste attrapée par le col du pyjama. Elle ne m’a pas cru et m’a giflé. C’est la première fois qu’elle me giflait. Je lui en ai terriblement voulu. Mais ça va mieux aujourd’hui, oui bien mieux, enfin je crois, c’est sûr que je le crois.

Le soir suivant, ma mère m’a ordonné de boire ce « putain de verre de lait ». Elle n’avait pas décoléré. Je me suis exécuté sans broncher. C’est là qu’on a tous entendu une sorte de couinement, comme si un chien gémissait. Ça venait encore de ce maudit placard. Bien sûr il n’y avait rien quand ma mère l’a ouvert. Bien sûr, il n’y a jamais rien eu derrière cette porte, comme on me l’a si souvent répété. Pourtant j’ai encore vu le ballon roulé aux pieds de ma mère ! Mais tout ça, c’est de ma faute, je suis le seul coupable, oui le seul.

Tous les soirs, je devais finir mon verre de lait « illico presto ». Et à chaque fois que je finissais ce maudit verre de lait, on entendait des gémissements sortir du placard. Ma mère a fini par m’accuser de ça, de gémir dans son dos quand elle s’avançait vers la porte du placard pour vérifier ses bruits. Ma sœur était encore plus terrorisée que moi, car elle disait à ma mère que dans son sommeil, on allait venir lui gratter la poitrine. Ma mère était excédée de nous et de tout ce qui se passait dans cette chambre. Elle a carrément fini par nous traiter de menteurs. Je n'aimais pas qu'elle dise ça, j’ai toujours détesté qu’on me traite de menteur. C'est vrai qu'au fond de moi je commençais à ressentir des pulsions violentes envers elle.

J'ai commencé à perdre le sommeil. Je dormais par courtes périodes et je me réveillais en sursaut, le front trempé de sueur, le regard rivé sur la porte du placard. La quatrième ou cinquième nuit après le début du verre de lait vide, je l’ai enfin vu…

À peine sorti d’un cauchemar, j'ai subitement plongé dans un autre. Mais celui-ci était bien réel. Je vous jure qu’il était réel. Haletant, suant, je scrutais la pénombre quand, sur ma gauche, là où dormait ma sœur, j’ai vu sa couette bouger. Je me suis dit que ce n’était pas grave, que c’était juste un de ces bras ou une de ces jambes qui animait la couette. Mais non, non ce n’était pas ça ! C’était impossible que ça soit ça ! Ça roulait doucement dessous, ça allait et venait, ça formait des bosses de tissu. Et puis ça mâchait, je suis sûr que ça mâchait ! La tête de ma sœur gigotait, geignait, des sons comme des crachats sortaient de sa gorge. Et puis j'ai perçu une voix rauque et lente, une voix qui répétait « faiiiiiiiiim, laiiiiiiiiiiiiiit, veuuuux laiiiiiiiiiiiit ». J’ai hurlé. Ma mère a accouru. J’ai alors vu la chose rouler sous la couette avant de se jeter sur la moquette et courir jusqu’à la porte du placard qui s’est refermée en claquant. Mais bien sûr ma mère n’avait rien vu. Elle s’est pris la tête en hurlant, car ce qu’elle avait vu, c’était la couette tachée de sang de ma petite sœur ! Son corps, son pauvre petit corps, était recouvert de morsures produites par des dents pas plus grosses que des aiguilles à tricoter. Et puis son pyjama était complètement déchiré ! Ce n’était pas moi, vous comprenez maintenant que ce n’était pas moi, c’était le monstre du placard !

Le médecin a conclu à des morsures de rats localisées au niveau de la poitrine et des tétons. J’étais soulagé quand j’ai appris ça par ma mère. Mais ce fut bref. Ma mère ne croyait pas aux conclusions du médecin. Son regard pesant était là pour me culpabiliser. Même si elle ne le disait pas, je l'entendais hurler dans mon oreille « C’EST TOI LE MONSTRE QUI A FAIT ÇA ! TU ES UN MONSTRE !

Dans la journée qui a suivi l’incident, ma mère a décidé que ma petite sœur dormirait avec elle dans son grand lit inoccupé par mon beau-père en voyage d’affaires au moment des événements. Même si je n’étais pas coupable, je n’avais pas d’autres choix que de l’accepter. J’allais devoir rester seul avec la chose du placard…

Ce soir-là, ma mère ne m’a même pas dit bonne nuit. Sur le palier de la porte, elle m’a juste regardé en secouant négativement la tête puis, avec un index barrant ses lèvres, elle m’a fait « chuuuuuuuuuut ». J’ai retenu un cri, un hurlement devant cette injustice. Car elle me laissait seul avec la chose qui se trouvait dans mon placard et qui encore ce soir, n’aurait pas son verre de lait…

Je ne sais plus quelle heure il était quand j’étais entendu les premiers gémissements. Je ne dormais pas. Avec ce qui s’est passé cette nuit-là et jusqu’à aujourd’hui, je n’ai plus jamais réussi à dormir sans une forte de dose de somnifères. Et qui le pourrait après ce que j’ai vu, qui ?

Le placard a grincé. En pleurant, en tremblant, j’ai allumé ma lampe de chevet et malheureusement, la lumière n’a pas effacé cette vision cauchemardesque. J’ai vu une sorte de main aux longs doigts comme des crochets se poser sur l’extérieur de la porte ; j'ai vu sa peau craquelée et brune ; j’ai vu les phalanges épaisses tapoter le bois comme si ce monstre était énervé. J’ai entendu sa voix rauque et lente, j’ai entendu ces mots qui ont glacé mon sang : « mooooooon laiiiiiiiit, jeeee veuuuux moooon, laiiiiiiit ».

La chose est sortie si vite du placard que je n’ai vu que ses quatre longues mains et un petit corps rouge et ridé courir sur la moquette jusqu’à sous mon lit en criant. « laiiiiiiiiiiiiiiiit, laiiiiiiiiiiit ». Mon matelas s’était mis à bouger, le monstre le poussait par en dessous. « laiiiiiiiiiiiiiit, laiiiiiiiiiiiiiit » répétait-il sans cesse. Le matelas était carrément soulevé. À chaque coup, je hoquetais comme si on me mettait des coups de poing dans le dos et que ma respiration se coupait. « LAAAIIIIIIIIIIIT LAAAAAIIIIIIIIIIIIIIT » répétait-il encore et encore. Ma mère a subitement ouvert la porte. Et au moment de me hurler dessus, ses mots se sont bloqués dans sa gorge. Elle a vu cette chose, je sais qu'elle a vu ce monstre, car ses yeux se sont écarquillés d'horreur…

À une vitesse incroyable, la chose a bondi sur elle en criant : « LAAAAIIIIIIIIIT LAAAAAIIIIIIIIIIIIIT ». Ma mère était enceinte. Avec ses longues mains, j'ai vu le monstre cisailler sa chemise de nuit et lui mordre ses seins pleins de lait ; je l’ai vu arracher le fœtus de son ventre et ouvrir une gueule remplie de centaines de petites arêtes en émail. J’ai vu le sang gicler de son corps, éclabousser les murs et souiller le parquet en gros bouillons épais…

Je me suis évanoui. Ma tempe a dû heurter le coin de ma table de nuit dans ma chute, car je ne pouvais être ailleurs que dans ma chambre quand les faits se sont produits…

À l’hôpital, je suis resté une journée dans le coma. C’est mon beau-père qui m’a découvert dans la chambre de maman. Il a dit à la police que j’avais dévoré ma petite sœur jusqu’à ne laisser que sa tête arrachée et ses membres disloqués sur la moquette. Il leur a dit que j’étais le seul occupant encore vivant de cette maison. Il leur a dit que les fenêtres et toutes les portes étant hermétiquement fermées de l’intérieur quand il est rentré de son voyage professionnel vers 8 heures du matin, soit quelques heures après les faits. Mon beau-père ne m’a jamais aimé et une fois de plus il venait d’en faire la plus cruelle des démonstrations. Ce qu’il a oublié de leur dire, c’est qu’il avait ramené un truc qui cognait dans sa valise six mois plus tôt, lors d’un séjour au Guatemala. Moi et ma petite sœur l’avions dit à maman, mais elle nous a affirmé qu’il n’y avait rien dans cette valise. Alors pourquoi ne nous a-t-elle pas laissés le vérifier ? Je n’ai pas rêvé, j’en suis sûr qu’il y avait un truc dans cette valise !


Personne n’a compris ce qui s’est passé cette nuit-là, personne sauf moi. Les médecins n’ont trouvé aucun morceau de chair ayant appartenu à ma petite sœur ou à ma mère dans mon organisme. Hormis sur la scène de crime, la police scientifique en a toutefois trouvé des traces dans le placard de ma chambre. Et des gouttelettes de lait maternel sur ses murs...  



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